Poéme d'Alfred de Musset !
La nuit de mai .
Lorsque le pélican ,lassé d'un long voyage,
Dans les brouillards du soir retourne a ses roseaux
Ses petits affamés courent sur le rivage
En le voyant au loin s'abattre sur les eaux .
Déja ,croyant saisir et partager leur proie ,
Ils courent a leur père avec des cris de joie ,
En secouant leurs becs sur leurs goitres hideux .
Lui ,gagnant à pas lents une roche élevée
De son aile pendante abritant sa couvée ,
Pécheur mélancolique ,il regarde les cieux .
Le sang coule a longs flots de sa poitrine ouverte ;
En vain il a des mers fouillé la profondeur ;
L'océan était vide et la plage déserte ;
Pour toute nourriture il apporte son coeur ,
Sombre et silencieux ,étendu sur la pierre ,
Partageant à ses fils ses entrailles de père ,
Dans son amour sublime il berce sa douleur ,
Et ,regardant couler sa sanglante mamelle ,
Sur son festin de mort il s'affaisse et chancelle ,
Ivre de volupté , de tendresse et d'horreur